juifsdumaroc
  MELLAH
 

Le Mellah de Fès,

premier de ce nom

 

 

                L’espace où se trouve aujourd’hui le Mellah, était, jadis, un « lieu de vente et de stockage du sel », de sel gemme (məlh) extrait de carrières situées à quelques kilomètres, au Jbel Tghat. C’est le sens original du mot « mellah » tel qu’on le retrouve, au XVIème siècle, dans le dictionnaire de Pedro de Alcala. Ce marché au sel, aux portes de la ville, a donné son nom au quartier que les Mérinides y édifièrent  à partir du XIIIème siècle, et qui se compose aujourd’hui du Palais Royal, du quartier juif et de Fès Jdid, longtemps appelé, d’un terme en usage chez les historiens jusqu’au XVIIème siècle,  Mellah al Mselmin « Mellah des musulmans ». Le terme s’est cependant spécialisé dans le sens de « quartier juif, au Maroc » jusque dans le dictionnaire Larousse,  à mesure que Marrakech, (XVIème),  Meknès (XVIIème), Essaouira (XVIIIème) adoptaient le mot pour les quartiers juifs qui y apparurent et furent dotés d’un statut administratif plus ou moins autonome.

                Rien à voir avec l’explication raciste et scabreuse de « saloir à têtes de condamnés » lancée par un journaliste anglais et qui a survécu un siècle durant dans de soi-disant « explications » coloniales…

                L’espace de l’actuel Mellah fut d’abord un quartier militaire, celui des archers sévillans, corps dissous au début du XIVème siècle. C’est seulement plus tard que les juifs commencèrent à s’y installer. Au XVème siècle le transfert de l’ancien quartier juif de la Médina était achevé, mettant un terme à une période de difficultés entre communautés qui prenait ses racines à l’époque almohade.

                Le quartier est peu étendu -un hectare et demi-  et s’organise de part et d’autre de la grande rue centrale, aujourd’hui Rue des Mérinides,  avec ses beaux balcons, principale différence architecturale avec la Médina qui n’en avait pas. Cette artère un peu plus large que les ruelles,  relie entre elles les deux portes principales : Bab el Mellah et Bab al Mecara,  « porte du cimetière ». Celle-ci s’ouvre sur l’ancienne Place du Commerce, édifiée effectivement sur une très vieille partie du cimetière israélite, dont les tombes ont été soigneusement transférées il y a une centaine d’année ! Entre la rue centrale et la rue commerçante qui longe le Palais –Boukhsissat- s’étend un quartier d’habitations, traversé par Derb el Fouqui  « Rue d’en haut »,  avec son four banal. De l’autre côté de la rue centrale un enchevêtrement  de ruelles desservies par l’autre four, précisément installé au derb al-farran at-tahti, « Rue du four d’en bas ». De là on passe au troisième espace du Mellah, les Nwawel.

                Ce quartier comme son nom l’indique, était le plus pauvre : « les huttes »… Celles-ci se pressaient au début du XXème siècle, au-delà d’un espace dédié au marché aux légumes et que l’on appelait le « jardin des ronces » carsa d-əzzərb. Cette place bordait le cimetière dans sa partie basse. Aujourd’hui c’est une place assez coquette, qui a oublié la folle agitation des jours de grand marché, les jeudis et veilles de fêtes, lorsque la ville de Fès comptait dix à douze mille juifs.

                Durant le Protectorat, la population du quartier déjà dense s’est encore densifiée. Une partie des juifs avaient déjà commencé à bâtir en Ville Nouvelle dans les années 1920, et ils dominaient en nombre dans plusieurs rues du centre « européen ». Ce quartier moderne compta jusqu’à quatre synagogues –dont la plus belle, Slat Ruben Saadoun, toujours en activité,  est visitable.

                En 1940, la politique anti-juive décrétée par le gouvernement de Vichy obligea une partie des juifs à retourner vivre au Mellah, déjà surpeuplé…

                Il y avait alors dix sept synagogues. Le Samedi la plupart organisaient deux (et exceptionnellement trois) séances de « Tefilla », prière du matin. La plus vaste, Sla del Hakham, n’existe plus, de même que Slat Rebbi Shimcon, près de Bab al Mecara. Celle-ci possédait une véritable  forêt de lampes à huile, suspendues au plafond, et dont l’allumage était vendu aux enchères, lampe après lampe, le soir de la fête de la Hilloula. Cette vente se faisait au bénéfice de la Hebra, association d’hommes courageux,  organisée
de façon très stricte, et qui se chargeait aussi bien d’enterrer les morts que de récolter le pain pour le distribuer aux pauvres,  chaque veille de Samedi, ou encore de fournir le gîte à l’étranger de passage, et encore, naguère,  de défendre les remparts contre les maraudeurs… 

                Mais il reste encore plusieurs synagogues sur pied, dont quatre sont visitables. S’ouvrant sur le cimetière,  Talmud Tora,  joue le rôle de petit Musée et attire son public.

                Au Derb al Ferran Tahti, la synagogue Danan,  du nom d’une lignée de plus de cinquante rabbins, a été restaurée par l’ « Association pour la restauration de la Synagogue Danan », dirigée par M. Benjamin Danan.  La Fondation du Patrimoine Culturel Judéo-Marocain a participé à cette tâche et gère, depuis, le monument, qui attire de nombreux visiteurs. Deux autres synagogues datées du XVIIème siècle,  devraient, selon l’UNESCO, le Ministère de la Culture, et la Fondation du Patrimoine, être restaurées. Ce sont Sla de Rebbi Mimoun Mansano, du nom d’une famille de rabbins de lignée espagnole, et Slat  əl fassiyin, « la synagogue des fassis », dans la Rue des fassiyin

                Synagogue « des fassis », à Fès ? Ce mystère n’en était pas un avant sa fermeture, en 1971… En effet on y faisait alors la prière selon le rite local des fassis, celui que l’on pratiquait, des siècles durant,  avant l’arrivée des juifs expulsés d’Espagne en 1492. Ce rite se caractérisait par certaines prières particulières réunies dans le rituel Ahabat Ha Qadmonim, « Amour des anciens ». Cette vieille synagogue a son histoire et attend de retrouver le respect auquel elle a droit.

                La Mecara, le cimetière de Fès,  est citée en exemple pour sa bonne tenue,  à la charge de sa hebra. Des grands rabbins qui y sont enterrés (entre autres Rebbi Yaaqob Abensour, Rebbi Haim Cohen, etc.) et  la jeune martyre de la foi : Lalla Solica. 

                Mais le Mellah n’était pas qu’un lieu de prière et de souvenir. Il vivait, et vit toujours, de l’activité de ses artisans. Naguère y dominait la fabrication du sqalli, du fil d’or. Dans les années 1930, le Protectorat  autorisa l’importation du fil d’or étranger, industriel, qui ruina, en peu de temps, une corporation  prospère d’artisans, hommes et femmes. Restent les bijoutiers. Les artisans orfèvres, étaient tous juifs avant la guerre de 1939-1945.  Depuis, des ouvriers musulmans ont été formés auprès des mcallemin juifs et sont devenus maîtres artisans à leur tour, perpétuant la tradition et l’excellence…

                                                                                                                                                                                         Simon Lévy




                                   LE QUARTIER JUIF DE TETOUAN

Le quartier juif de Tétouan, comme ceux de Rabat et Salé date de 1808-1810, lorsque Moulay Sliman, sans doute pour mieux contrôler la situation au moment ou les guerres napoléoniennes avaient atteint le détroit de Gibraltar, ordonna le relogement des juifs de ces ports dans de véritables Mellahs protégés. C’est pourquoi on parle à Tétouan de Mellah el Bali, vieux quartier dans la Médina, de Judéria, aux rues tracées selon un plan d’ensemble et que se coupent à angle droit. Là étant regroupé une nombreuse communauté juive, bilingue, pratiquant intra muros son vieux parler d’origine espagnole, la Hakitia. Car, Tétouan s’étant repeuplée au XV e de réfugiés d’Espagne : d’abord Sidi el Mandri et ses marins venu d’Andalousie, avant même la chute de Grenade, pour continuer la lutte sur mer ;; puis les juifs chassés de castille en 1492.

La synagogue de Rabbi Isaac Ben gualid porte le nom du grand rabbin de la ville, mort en 1870 à un âge avancé, auteur de Vayomer Ishaq, ouvrage de consultations et décisions juridiques faisant jurisprudence. Le bâtiment à trois niveaux : Il se présente sous la forme classique des maisons à patio central, protégé et éclairé par une montera vitrée ; Le rez de chaussée, patio entouré de salles de prière forme la Tefilla, la synagogue proprement dite, avec sa petite Teba classique, deux armoires «  hekhal » pour abriter les sefarim et une petite ‘azara protégée par un rideau pour les femmes. Cas rare sinon unique, la synagogue disposant au rez de chaussée d’une installation pour la confection des galettes de paques (massa semora) : bassin et four réserver exclusivement à cet usage.

Au premier étage, une sale qui servit de tribunal rabbinique, et aussi de Yeshiva, ainsi qu’une deuxième ‘azara, plus vaste, pour les femmes.

Le second étage était un appartement : vaste chambre avec une alcôve surélevée, cuisine et alambic.

         La famille Ben gualid a confié au conseil des communautés et à la fondation du patrimoine, la gestion de l’ensemble de ce lieu de mémoire du judaïsme tétouanais où, chaque année est  célébrée la Hilloula du saint Isaac Ben gualid.

Il a fallu, dans un premier temps, procéder à une opération de sauvetage du bâtiment menacé par les eaux d’infiltration. La restauration proprement dite à été effectuée, sans un deuxième temps, dans le cadre de la restauration du Tétouan historique, entreprise sous la direction de la municipalité, par la mission du gouvernement autonome de l’Andalousie (bâtiment) et la Fondation (mobilier et suivi des travaux). La synagogue restaurée a été  inaugurée à nouveau, en présence de M. Chavez, président du gouvernement autonome d’Andalousie, M Achaari, Ministre de la culture, Talbi Alami, Ministre des travaux publics et Maire de la ville.


 
  Aujourd'hui sont déjà 6 visiteurs (7 hits) Ici!  
 
Ce site web a été créé gratuitement avec Ma-page.fr. Tu veux aussi ton propre site web ?
S'inscrire gratuitement